Edito

C’est vers la fin du siècle passé qu’a germé l’idée qu’il était nécessaire et urgent de décloisonner le système de santé régional en amenant les institutions et les médecins indépendants à se mettre en réseau pour mieux collaborer. Dès les balbutiements, il avait paru évident qu’un dossier partagé serait nécessaire pour que l’information circule de manière fluide et sécurisée dans ce système réformé. Deux graines étaient donc semées simultanément mais, alors que le terrain du réseau verdissait joliment au bénéfice de tous, celui du dossier électronique du patient (DEP) restait désespérément stérile. La technologie n’était pas encore au rendez-vous, et la communauté sanitaire pas prête à faire le saut.

Une bonne génération plus tard, le Réseau Santé Nord Broye (RSNB) a pris racine. Au prix d’efforts constants, il a développé ses ramifications, apportant de nouvelles prestations dans les domaines de l’orientation des patients, de la coordination des soins, du diabète, des soins palliatifs, de la gériatrie, de la santé mentale, de la réponse à l’urgence, etc. Il coordonne une cellule de crise régionale qui s’est activée au moment du COVID et reste vigilante dans le domaine de la santé communautaire, en matière d’engorgement des lits, d’afflux de migrants ou d’approvisionnement en énergie. Dans le même temps, le DEP suscitait certes des efforts de développement mais, en termes d’utilité pratique, restait une coquille vide.

Le DEP, une essence délicate, à cultiver avec persévérance

Récemment, avec l’entrée en vigueur d’un cadre légal et l’activation de la communauté CARA, responsable du déploiement du DEP en Suisse occidentale, le RSNB a reçu la mission d’assister les institutions et les patients de la région dans la création des indispensables identités numériques et l’ouverture de dossiers individuels. Les conditions de germination sont donc enfin réunies, mais qu’on ne s’emballe pas ! Le DEP est une essence délicate qui devra, n’en déplaise aux politiciens pressés, être cultivée avec un maximum de précautions et de persévérance.

Pour pouvoir envisager une première floraison, il faudra en tous les cas partir à la rencontre de la population, ce à quoi s’emploie dès maintenant le RSNB ; il faudra aussi que les grandes institutions commencent à alimenter automatiquement le système et, surtout, que des applications à haute valeur ajoutée y fassent leur apparition, comme un plan de médication partagé, réclamé à grands cris dans notre région suite à un essai pilote prometteur.